Partie pour l'Éternité
Cette histoire vient d'une fille qui bossait de nuit dans un net café de Shinsaibashi, celui au quatrième de la galerie commerciale, en face de la sortie nord du métro. Elle l'a racontée le matin de sa démission, dans un bar à ramen miteux du quartier coréen.
C'était pendant la vague de chaleur de l'été dernier. Un des habitués était un ancien prof de jeux traditionnels, la cinquantaine bien portée malgré les galères. Son école avait coulé pendant le , et depuis, il vivait dans les net-cafés où il donnait des cours en ligne pour subsister. Type discret, il restait toujours tiré à quatre épingles malgré sa vie de box en box.
Cette nuit-là, vers , une femme est entrée — grande, élégante, en kimono bleu nuit. Pas le genre qu'on voit d'habitude. Comme les boxes près de l'entrée étaient occupés par des joueurs assez bruyants, la fille l'a installée dans la zone calme, à côté du professeur.
Le lendemain matin,
quand l'équipe de jour est arrivée,
ils ont trouvé le professeur affaissé sur son clavier,
le visage étrangement paisible.
Sa main,
encore posée sur la souris,
avait la rigidité du marbre.
Son écran diffusait une partie de ōgi en milieu de jeu.
Dans la fenêtre de chat,
le dernier message —
おやすみ~
—
avait été laissé par une certaine komayo à 4h17.
À en croire le registre des entrées,
ce pseudo correspondait au nom de la femme,
駒妖,
partie sans bruit quelques instants plus tard.
Le professeur avait perdu au temps.